Cassie & Devon
▬ Cassie avait les yeux qui lui piquaient et un mal de crâne indescriptible. Elle avait l’impression qu’un rouleau compresseur s’était amusé à faire le tour de son cerveau une ou deux fois, lui écrabouillant au passage les quelques neurones qui lui restaient. Cette soirée, même ayant été assez agréable, risquait fortement de devenir un cauchemar à oublier pour la jeune fille. Elle se préparait psychologiquement à l’idée de passer la journée accrochée aux toilettes à ruminer toute seule sur sa stupidité. Donc vous vous imaginez bien qu’en voyant que Devon était à son chevet à son réveil, le cœur de la blondinette se réchauffa.
Elle se souvenait de tous ces matins où elle s’était réveillée à côté de lui, la figure dans un état lamentable et une envie de vomir inimaginable, où il se tournait vers elle et, malgré le fait qu’il soit dans le même état qu’elle, faisait tout son possible pour s’occuper d’elle. Ces matins où c’était ses yeux bleus qu’elle voyait la fixer en ouvrant les yeux. Ces matins où ils se moquaient de leur état mutuellement. Ces matins où plus rien n’avait d’importance. Sauf eux.
Mais évidement, depuis son entrée chez les Iotas, elle n’aurait jamais imaginé que ces petits moments parfaits se reproduiraient. Elle avait été bien trop stupide pour ça. Pourtant, Devon était bien là, devant elle, la regardant l’air serein. Voir comme ça que malgré ses actes, son meilleur ami s’inquiétait toujours pour elle lui donnait envie de le prendre dans ses bras et d’ébouriffer ses cheveux, comme elle avait l’habitude de faire quand elle était petite. Elle avait envie de le serrer très fort et de rester toute la journée comme ça, parce que quand ses bras l’entouraient, il ne pouvait jamais rien lui arriver.
« Chou, c'est pas un super moment pour passer. J'vais certainement passer la journée à quatre pattes à dégueuler donc ça risque de pas être très agréable pour toi. »
Il était clair qu’elle n’allait pas pouvoir faire grand-chose de la journée, donc elle était obligée de le lui dire. Pourtant en elle, une petite voix lui criait qu’elle était stupide et qu’au lieu de sortir des conneries pareilles, elle aurait pu faire un effort et juste avouer à Devon qu’il lui manquait et que ça lui faisait plaisir de le voir. Mais non. Cassie était Cassie. Point.
Mais justement, Devon était Devon. Il rigola légèrement et remarqua :
« C'est pas comme-ci c'était la première fois non plus. »
Cassie laissa échapper un sourire.
« C’est pas faux. Mais bon, je t’en voudrais pas si tu décides de t’en aller vite fait avant que je me retransforme en zombie. »
Devon se leva et lui rapporta une bouteille d’eau et une aspirine. Qu’est-ce qu’il pouvait être adorable ce garçon !
« Tiens, avale ça la belle au bois dormant. »
Cassie prit l’aspirine qu’il lui tendait et le remercia d’un baiser sur la joue. Ce n’est que quelques secondes plus tard qu’elle se rendit compte du geste qu’elle venait d’effectuer. Ce genre de touches d’affections, elles étaient courantes entre eux. Depuis petits ils se connaissaient et cela n’avait jamais voulu illustrer plus qu’une profonde affection. Pourtant depuis l’épisode du parc, Cassie se sentait obligée d’analyser chacun de ses mouvement avant de les faire, de peur de mal agir, de mettre Devon mal à l’aise ou quelque chose dans le genre. Et justement, les baisers sur la joue étaient passés dans la liste des choses à surtout ne pas faire. Mais le plus étrange dans l’histoire, c’était l’effet que cela lui avait fait. A Cassie.
Habituellement, il ne s’agissait que du contact de sa peau sur ses lèvres. Mais cette fois-ci, tout avait changé. Elle n’avait pu s’empêcher de remarquer à quel point la peau du garçon était lisse, combien elle était douce, combien elle était chaude…
Stop. Il fallait qu’elle se reprenne. Et puis c’était quoi ces conneries de peau et tout ça hein ? C’était rien. Juste de l’affection. Absolument rien.
[…]
Devon rangea son portable et demanda :
« Alors, pourquoi est-ce que t'as bu autant ? Et ne me dis pas que c'était juste pour s'amuser comme ça, pour le fun. J'en croirai pas un mot. »
Cassie se mordit la lèvre. Oui.. Devon la connaissait vraiment bien. Et c’était d’ailleurs parfois un inconvénient. Elle n’allait quand même pas lui avouer que toute cette histoire l’avait chamboulée ! Et parce qu’elle culpabilisait de l’avoir tourné en bourrique, et parce que malgré tout ce qu’elle avait fait pour se changer les idées, elle n’arrivait pas à chasser de son esprit le contact de ses lèvres sur les siennes. Alors elle se contenta de prendre son air « cool » et répliqua en haussant les épaules :
« Boah ! L’alcool était gratuit. »
Conneries. La famille de Cassie avait toujours été particulièrement aisée au niveau financier. Elle avait donc toujours disposé d’une quantité d’argent faramineuse qui n’attendait à être utilisée que pour acheter ce genre de boissons justement.
La jeune fille savait très bien que Devon n’était pas dupe. Mais ça suffisait à lui faire comprendre qu’elle n’avait aucune envie d’en parler. Mais justement, « parler », c’était ce que voulait son meilleur ami.
« D'ailleurs, dès que tu seras dans un état potable ma belle, il faudra qu'on parle. »
Outch. Ca se compliquait. Cassie n’avait jamais aimé les « discutions sérieuses » de ce genre. C’était le genre de moment où son cœur battait à toute allure et où elle ne savait absolument pas quoi répondre. Et même si c’était Devon… non… JUSTEMENT parce que c’était Devon, malgré l’attitude calme et posée du garçon, la jeune fille paniquait comme jamais. Elle allait devoir lui expliquer qu’elle était une mauvaise amie, qu’elle avait mit leur relation en péril pour ses petites envies et évidement, allait devoir prononcer le « De toute façon, cela ne représentait rien. Non ? » et Devon approuverait. Sauf que pour lui, ce serait sincère.
Bon.. Il fallait se dire que ce n’était qu’un mauvais moment à passer. Que plus vite ils auraient « parlé », plus vite elle serait libérée de ce fardeau.
« Parles, petit garçon. Jt’écoute. »