C'est un texto qui me réveille, là maintenant. La vibration de mon portable m'a presque fait exploser la tête. En ayant très peu dormi cette nuit, je m'énerve seule contre mon téléphone dans ma chambre du pavillon. Je pense d'ailleurs à le jeter de toute mes forces sur le mur trop violet de ma chambre, mais je me retiens et dans un bâillement bien trop grand, je regarde qui a osé faire ça.

Ma colère s'estompe alors, et un sourire vient se coller sur mon visage, je le sais. Parce qu'il faut l'avouer avec A-Juliette, je ne suis jamais énervée. C'est à se demander avec qui je pourrai l'être, ma gentillesse me perdre, un jour, je crois. Tirée de mon sommeil pour aller rejoindre mon ami, je passe devant mon bureau où se trouve une lettre de mon père, non-ouverte, juste posée, je la soupçonne d'être le chèque mensuel. Le don de son amour, en somme, le con.

Je soupire un bon coup pour me donner ce certain courage que je vois venir dont ne sait où. Je souris mélancoliquement, me permets même de penser à maman. Haussant les épaules, je me dirige vers la salle de bain, prends ma douche en un éclair, attache mes cheveux, encore une fois, pour paraitre je ne sais pas, un peu plus moi, la sportive que j'ai été, que je ne suis plus.

Un coup de maquillage parce qu'on ne sait jamais qui on peut croiser et je me mets en route pour le rendez-vous donner par mon amie, je ne sais pas de quoi elle veut parler, m'en fiche un peu, je crois qu'à peine réveiller j'ai envie de me changer les idées, alors je fonce droit, sans réfléchir, sans même regarder les gens qui passent autours de moi, la chef des Lambda n'est peut être pas d'humeur, qui sait. Personne à l'évidence, même moi, je ne sais pas comment je fonctionne je crois.

Je presse un peu le pas, arrive proche de l'endroit posé par A-Juliette, je souris d'avance, parce que c'est toujours bien de se dire qu'un moment prochain sera bien. Sans prise de tête et sans rien, juste deux amies, certes qui ne sont pas de la même confrérie, mais qui sont là, elles existent. Ca change d'avec Reyne, je crois, avec elle, tout est différent, parce qu'elle est différent.

Mon attention se porte alors sur un fredonnement que j'entends, je secoue le visage dépitée. Bon sang, mais la vraie musique, ce n'est pas ça. Je m'avance et vais me placer tout à côté d'elle, tout en souriant, comme une enfant, je regarde le dessin qu'elle est en train de faire, hallucinée, j'ai envie de me taire, parce que le dessin, ce n'est clairement pas fait pour moi. Et les gens capables de faire cela, je ne sais pas, je me dis que ce sont un peu des gens à part quoi. Ils sont grands, je crois, ces gens là.

- Le dessin, génial, mais la musique ... que je finis par dire en riant à moitié avant de lui déposer un bisou sur la joue. Je t'adore quand même ma chérie, même si tu aimes les Maroon five que moi je hais. Alors, jolie cœur, de quoi tu voulais me parler ?

Je fronce le nez à un de ses traits de crayon sur sa page bientôt pleine, je crois. J'ai envie de rire tant je ne m'y connais pas. Je suis faite pour les bureaux, moi, défendre les gens, plaidoyer, l'art ça semble si loin de mon monde, de mon esprit. J'aurai pu en parler quand j'étais plus petite, surement, mais je ne savais même pas colorier, il me semble. Je ne suis vraiment pas douée, alors je détourne mes yeux, regarde le ciel bleu, pense à tout à rien, me demande pourquoi elle m'a faite venir ici ce matin. Je respire calmement, ressens la passion à la fin de sa musique, son chant.

Merci, mais j’ai pas fini, je te le montrerai quand il sera en couleur. J'espère bien que tu m'adores même si j'écoute ça!

Je lui souris, pour toute réponse, comme je le fais souvent. On s'en fiche de la musique, je crois. Le plus important, c'est qu'elle en écoute à la vérité. Je ne pourrai pas avoir des amies qui ne sont pas fans de cela, la musique c'est la vie, je ne me dis que très peu de fois, mais quand je me le dis, j'aime bien, ça fait ce genre de pensée de vie, un style de philosophie. Je pince mes lèvres, m'en veux un peu d'avoir trouvé le dessin beau avant même qu'il ne soit fini, je me dis que peut être pour elle, il est loin de l'être, beau s'entend.

Et la musique, bah, tu sais hein, j’aime les trucs un peu déprimant par moment, et là, je suis dans ce moment.

Je soupire, pas contente de sa réponse, parce que moi j'ai appris à aimer la musique tant qu'elle me met de bonne humeur. Avec tout ce que j'ai du supporter, la mort de ma mère, et le reste, je me dis que même la chanson Pocketful of Sunshine est une bonne chanson. Tant qu'on peut hurler dessus pendant environ trois minutes, c'est bon. Alors, non, je ne suis pas franchement heureuse de sa réponse. Je veux dire, pourquoi provoquer la déprime ? C'est une chose que je ne comprends pas, je crois, que je ne comprendrai jamais, il faut l'avouer.

Tu sais hein, j'avais envie de te voir.

J'observe son visage d'ange, me délecte de ses expressions, je la trouve jolie, encore une fois. Me demande un peu pourquoi elle voulait me voir, mais je commence à penser que c'était juste comme ça, histoire de se voir quoi. Mes doigts vont alors papillonner sur son dessin, je n'explique pas mon geste, il existe, point. Je pince mes lèvres, une petite idée derrière la tête.

- Mais moi, je suis contente d'être là, avec toi.

Que je lui dis pour répondre à sa dernière phrase, et puis ... Et puis je me dis que je ne sais pas, je n'ose pas, parce que je sais que je suis nulle pour cela. Mais quand même, autant essayer, si je ne le fais pas avec elle, avec qui je pourrai ? Mes doigts suivent les traits de crayon, et je souris, pour changer. Le soleil brûle un peu ma peau, et me donne ce courage nouveau, celui de lui demander, ce que ma tête me dicte de faire depuis que j'ai vu son dessin.

- Tu m'apprendras, hein, un jour ?

A dessiner aussi bien que toi, dis moi ?